mercredi 20 février 2008

Frère Roger - 1915/2005 - Editions Perrin

Yves Chiron

Frère Roger
1915-2005
Le fondateur de Taizé
(Éditions Perrin, février 2008)


415 pages, prix librairie : 21,50 euros
par correspondance: 25 euros (port compris)
Paiement à adresser à l’ASSOCIATION NIVOIT
5, rue du Berry - 36250 NIHERNE




Le nom de Taizé est aujourd’hui universellement connu. Les célèbres Chants de Taizé ont été traduits dans des dizaines de langues. Les « Rassemblements de Taizé », sur la colline bourguignonne, dans une grande ville d’Europe en fin d’année ou ailleurs dans le monde, attirent, à chaque fois, des dizaines de milliers de jeunes de toutes nationalités.
Il y a un « mystère Taizé », qui a fasciné les hommes d’Eglise comme les profanes. Mystère de son succès et mystère de son fondateur, figure charismatique.
Pourtant, la figure emblématique du fondateur, Frère Roger – Roger Schutz à l’état-civil (1915-2005) – reste, à bien des égards, méconnue.
Ce livre, première biographie historique de Frère Roger, voudrait échapper à la légende, non pour en prendre systématiquement le contre-pied, mais pour restituer toute une vie dans son contexte historique.
La tâche n’a pas été facile. Taizé n’aime ni l’histoire ni les archives et cultive un certain goût pour le secret ou le discret.
Les rencontres de Roger Schutz et de Max Thurian avec Pie XII et d’autres autorités romaines en 1949 et 1950 n’ont été connues du grand public qu’en 1960 [1]. Frère Roger a choisi son successeur, frère Alois, dès 1978, au cours d’un voyage en Afrique, mais il ne l’annonce à sa communauté que vingt ans plus tard. La communion de Frère Roger à l’Eucharistie catholique, qu’il reçoit depuis 1972, n’apparaît au grand jour que lors de la messe des funérailles de Jean-Paul II, en 2005.
Et que dire de l’itinéraire religieux de son grand-père maternel : séminariste catholique jusqu’au sous-diaconat, puis prêtre dans l’Eglise vieille-catholique, avant d’être consacré pasteur réformé ? Frère Roger n’en a jamais parlé et, aujourd’hui encore à Taizé, c’est une sorte de tabou à ne pas transgresser.
La recherche de Frère Roger, nous avons essayé, ici, de la restituer au plus près. Sans nous arrêter à la « légende », mais aussi avec le souci de ne pas travestir la vérité d’un itinéraire exceptionnel.
Outre les volumes du Journal de Frère Roger, où, souvent, il faut savoir lire entre les lignes, d’autres sources permettent de reconstituer les diverses étapes de sa vie. Il y a, d’abord, les témoignages que nous avons pu recueillir auprès de certains membres de sa famille (par exemple, sa fille adoptive, Marie Strugala), auprès de frères ou d’anciens frères de la Communauté et auprès de ceux qui, catholiques, protestants ou orthodoxes, ont été les témoins de sa vie.
De nombreuses archives ecclésiastiques, institutionnelles ou privées, attendaient aussi l’historien, en France et en Suisse. Elles se sont avérées très riches, pleines de surprises et de documents précieux pour mieux saisir les décisions et les tentatives.
Frère Roger fut un « passeur » de frontières. Suisse, il s’installe en France en 1940. Calviniste, il fonde la première communauté monastique protestante en terre française. Fils de pasteur, pasteur lui-même, il est allé au-delà du protestantisme. « Il est formellement catholique » disait, en 2005, le cardinal Kasper, président du Conseil pontifical pour l’Unité des chrétiens, au cardinal Barbarin qui l’interrogeait sur l’appartenance confessionnelle de Frère Roger [2].
Il a toujours franchi les murailles pour aider et rassembler. En 1940-1942, il aide des réfugiés politiques et des Juifs ; en 1945-1946, il soulage deux camps de prisonniers de guerre allemands établis près de Taizé ; dans les années 1950-60, il est à la pointe du dialogue œcuménique ; dès 1966, il pressent une vague de contestation radicale dans la jeunesse d’Europe et il saura y voir une soif de questions. Et le reste de sa vie, il mettra en œuvre une pédagogie d’accompagnement de la jeunesse qui sera admirée par beaucoup et critiquée par certains.
Frère Roger appartient maintenant à l’histoire de l’Eglise mais aussi à l’histoire de l’Europe. Les Eglises, elles, ont vu en lui un rassembleur qu’elles n’ont pu tenir à l’écart, avec lequel elles ont entretenu un dialogue, parfois rude et difficile. Si Taizé, d’origine protestante, s’est rapproché du catholicisme, il y a eu un mouvement inverse : Taizé a influencé et le protestantisme et l’Eglise catholique.

(Extrait de l’introduction)
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[1] Le premier article qui évoque ces rencontres paraît dans le Monde le 27 octobre 1960.
[2] Lettre du cardinal Barbarin à l’auteur, le 23 février 2007.