vendredi 29 février 2008

[Aletheia n°121] Dom Gérard (1927-2008) par Yves Chiron

Que faire de mieux, d’abord, sinon reproduire le faire-part de décès que publie l’Abbaye Sainte-Madeleine du Barroux pour informer ses amis et les fidèles de la mort de leur fondateur :


Le T.R.P. Abbé et la communauté
de Sainte-Madeleine du Barroux,
ont l’immense douleur de vous faire part
du décès de
leur vénéré fondateur et premier Abbé,
le T.R.P. Dom Gérard CALVET
Né à Bordeaux le 18 novembre 1927,
il était entré au monastère de Madiran en 1950.
Après le transfert de la communauté, c’est à Tournay
qu’il avait prononcé ses premiers voeux le 4 février 1951
et qu’il avait été ordonné prêtre le 13 mai 1956.
Ayant fondé la communauté de Bédoin en 1970,
il avait entrepris ensuite la construction de l’abbaye du Barroux.
Après la reconnaissance canonique de celle-ci,
il en avait été nommé le premier Abbé par le Saint-Siège
et avait reçu la bénédiction abbatiale le 2 juillet 1989.
Il avait résigné la charge abbatiale en novembre 2003.
Requiescat in Pace.
Le T.R.P. Abbé et la communauté de Sainte-Madeleine,
la T.R.M. Abbesse et la communauté de Notre-Dame de l’Annonciation,
le Père Prieur et la communauté de Sainte-Marie de la Garde,
en union avec ses frères Jean et Hubert Calvet,
recommandent à vos prières l’âme de leur très aimé Père
et vous prient d’assister ou de vous unir d’intention
à la messe des funérailles qui sera chantée à l’Abbaye
le lundi 3 mars 2008 à 10h00.


Que de souvenirs remontent à la mémoire et la gratitude surmonte aisément la tristesse parce que la vie sur cette terre n’est que passage, tandis que le bien fait restera éternellement et sera compté au jour du Jugement.
Le communauté résidait encore à Bédoin quand un séminariste, agrégé de lettres et aujourd’hui évêque, me fit découvrir une communauté bénédictine qui résistait à la tempête post-conciliaire. C’était en 1980. À la même époque, je découvrais dans Itinéraires les mises en garde du prieur de Bédoin, Dom Gérard, contre la « surenchère » et la « tentation » des « schismatiques de droite ».
Des relations plus étroites, nouées plus tard avec le Père abbé du Barroux, m’ont fait goûter ce que peuvent être la mansuétude et la bienveillance d’un moine. Des dizaines de lettres ou de courts billets, de son écriture reconnaissable entre toutes, en gardent la trace et le souvenir.
Il avait eu le R.P. Eugène de Villeurbanne, fondateur de la communauté capucine traditionnelle de Morgon, comme directeur spirituel. Quand j’avais entrepris d’écrire la vie de ce saint fondateur capucin, Dom Gérard m’avait reçu au Barroux, Père Abbé à la potestas de prime abord impressionnante, dans son grand fauteuil, mais très vite il m’avait fait comprendre ce que doivent être l’attention et l’affection toute spirituelle d’un supérieur pour ses frères.
Quand cette modeste Aletheia a commencé à paraître, Dom Gérard en a été un lecteur de la toute première heure, attentif, et d’une générosité continuelle et sans pareille. Quand, en 2002, mon épouse, nos deux enfants et moi-même, nous nous sommes lancé dans l’aventure d’adopter, en Lituanie, trois autres enfants, le R. P. Abbé du Barroux nous a suivis, pas à pas, dans nos périples Nach Ost. Il nous a accompagnés de ses prières, de son attention et de ses bienfaits (comment ne pas rendre hommage, maintenant, à la « quête » discrète qu’il avait faite, auprès de ses moines et de leurs familles, pour nous et qui fut si généreuse).
Dans les années 1980, Dom Gérard avait publié des Lettres aux « Jeunes mamans », aux « Mères de famille ». Je citerai ici une autre lettre qu’il a adressée à une mère de famille qui avait scrupule à s’approcher de la Sainte Communion :
Comme d’autres personnes que je connais & qui sont dans le même cas que vous, peut-être avez-vous scrupule d’user d’une permission que jadis vous ne possédiez pas et qui aujourd’hui vous est rendue sans mérite de votre part.
Mais la question ainsi posée reste insoluble. Car nous ne méritons jamais rien. Tout est don. Surtout la sainte Eucharistie.
Or Notre Seigneur a un désir infiniment plus grand de vous transmettre sa vie, que vous de la recevoir. Refuser ce don n’est pas une juste forme d’humilité, comme si nous pouvions mériter quelque chose de nous-même. La vraie humilité consiste à se confier à la miséricorde divine. Nous en faisons l’expérience tous les jours.
À un père de famille, qui lui soumettait un beau plan de catéchisme pour préparer des enfants déjà grands au baptême, Dom Gérard écrivait encore, avec délicatesse :
Votre KT préparatoire me semble très complet surtout si vous ajoutez (mais vous le faites, j’en suis sûr) Jésus-Hostie… et le bonheur d’être à Dieu !
Quelle leçon ! Combien de traits et d’enseignements de cette sorte pourraient être cités. Dom Gérard fut un combattant, un résistant. Il y aurait beaucoup à raconter, à dire, dans la vérité de l’histoire. Mais, dans l’immédiat, c’est du Père spirituel qu’il convient de se souvenir.

mercredi 20 février 2008

Frère Roger - 1915/2005 - Editions Perrin

Yves Chiron

Frère Roger
1915-2005
Le fondateur de Taizé
(Éditions Perrin, février 2008)


415 pages, prix librairie : 21,50 euros
par correspondance: 25 euros (port compris)
Paiement à adresser à l’ASSOCIATION NIVOIT
5, rue du Berry - 36250 NIHERNE




Le nom de Taizé est aujourd’hui universellement connu. Les célèbres Chants de Taizé ont été traduits dans des dizaines de langues. Les « Rassemblements de Taizé », sur la colline bourguignonne, dans une grande ville d’Europe en fin d’année ou ailleurs dans le monde, attirent, à chaque fois, des dizaines de milliers de jeunes de toutes nationalités.
Il y a un « mystère Taizé », qui a fasciné les hommes d’Eglise comme les profanes. Mystère de son succès et mystère de son fondateur, figure charismatique.
Pourtant, la figure emblématique du fondateur, Frère Roger – Roger Schutz à l’état-civil (1915-2005) – reste, à bien des égards, méconnue.
Ce livre, première biographie historique de Frère Roger, voudrait échapper à la légende, non pour en prendre systématiquement le contre-pied, mais pour restituer toute une vie dans son contexte historique.
La tâche n’a pas été facile. Taizé n’aime ni l’histoire ni les archives et cultive un certain goût pour le secret ou le discret.
Les rencontres de Roger Schutz et de Max Thurian avec Pie XII et d’autres autorités romaines en 1949 et 1950 n’ont été connues du grand public qu’en 1960 [1]. Frère Roger a choisi son successeur, frère Alois, dès 1978, au cours d’un voyage en Afrique, mais il ne l’annonce à sa communauté que vingt ans plus tard. La communion de Frère Roger à l’Eucharistie catholique, qu’il reçoit depuis 1972, n’apparaît au grand jour que lors de la messe des funérailles de Jean-Paul II, en 2005.
Et que dire de l’itinéraire religieux de son grand-père maternel : séminariste catholique jusqu’au sous-diaconat, puis prêtre dans l’Eglise vieille-catholique, avant d’être consacré pasteur réformé ? Frère Roger n’en a jamais parlé et, aujourd’hui encore à Taizé, c’est une sorte de tabou à ne pas transgresser.
La recherche de Frère Roger, nous avons essayé, ici, de la restituer au plus près. Sans nous arrêter à la « légende », mais aussi avec le souci de ne pas travestir la vérité d’un itinéraire exceptionnel.
Outre les volumes du Journal de Frère Roger, où, souvent, il faut savoir lire entre les lignes, d’autres sources permettent de reconstituer les diverses étapes de sa vie. Il y a, d’abord, les témoignages que nous avons pu recueillir auprès de certains membres de sa famille (par exemple, sa fille adoptive, Marie Strugala), auprès de frères ou d’anciens frères de la Communauté et auprès de ceux qui, catholiques, protestants ou orthodoxes, ont été les témoins de sa vie.
De nombreuses archives ecclésiastiques, institutionnelles ou privées, attendaient aussi l’historien, en France et en Suisse. Elles se sont avérées très riches, pleines de surprises et de documents précieux pour mieux saisir les décisions et les tentatives.
Frère Roger fut un « passeur » de frontières. Suisse, il s’installe en France en 1940. Calviniste, il fonde la première communauté monastique protestante en terre française. Fils de pasteur, pasteur lui-même, il est allé au-delà du protestantisme. « Il est formellement catholique » disait, en 2005, le cardinal Kasper, président du Conseil pontifical pour l’Unité des chrétiens, au cardinal Barbarin qui l’interrogeait sur l’appartenance confessionnelle de Frère Roger [2].
Il a toujours franchi les murailles pour aider et rassembler. En 1940-1942, il aide des réfugiés politiques et des Juifs ; en 1945-1946, il soulage deux camps de prisonniers de guerre allemands établis près de Taizé ; dans les années 1950-60, il est à la pointe du dialogue œcuménique ; dès 1966, il pressent une vague de contestation radicale dans la jeunesse d’Europe et il saura y voir une soif de questions. Et le reste de sa vie, il mettra en œuvre une pédagogie d’accompagnement de la jeunesse qui sera admirée par beaucoup et critiquée par certains.
Frère Roger appartient maintenant à l’histoire de l’Eglise mais aussi à l’histoire de l’Europe. Les Eglises, elles, ont vu en lui un rassembleur qu’elles n’ont pu tenir à l’écart, avec lequel elles ont entretenu un dialogue, parfois rude et difficile. Si Taizé, d’origine protestante, s’est rapproché du catholicisme, il y a eu un mouvement inverse : Taizé a influencé et le protestantisme et l’Eglise catholique.

(Extrait de l’introduction)
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[1] Le premier article qui évoque ces rencontres paraît dans le Monde le 27 octobre 1960.
[2] Lettre du cardinal Barbarin à l’auteur, le 23 février 2007.

vendredi 15 février 2008

Un nouveau livre d'Yves Chiron: Frère Roger de Taizé

le nouveau livre d'Yves Chiron vient de paraitre:
Frère Roger de Taizé | 1915-2005 | Le fondateur de Taizé
Contenu
Introduction
1. Petit-fils de prêtre, fils de pasteur.
2. Une conversion.
3. Naissance d’une communauté.
4. Retour à Taizé.
5. Les pas décisifs.
6. Entre Genève, Paris et Rome.
7. Au concile Vatican II.
8. « Sortir de l’impasse ».
9. Le concile des jeunes.
10. « Un nomade ».
11. « Autour du Pasteur universel ».
12. Taizé, « une vocation provisoire ».
Notes
Sources
Remerciements

Éditions Perrin, parution février 2008. 415 pages, prix librairie : 21,50 euros.
Bon de commande: voir le document PDF
Yves Chiron
Frère Roger | 1915-2005 | Le fondateur de Taizé
(Éditions Perrin, février 2008)
Le nom de Taizé est aujourd’hui universellement connu. Les célèbres Chants de Taizé ont été traduits dans des dizaines de langues. Les « Rassemblements de Taizé », sur la colline bourguignonne, dans une grande ville d’Europe en fin d’année ou ailleurs dans le monde, attirent, à chaque fois, des dizaines de milliers de jeunes de toutes nationalités.
Il y a un « mystère Taizé », qui a fasciné les hommes d’Eglise comme les profanes. Mystère de son succès et mystère de son fondateur, figure charismatique.
Pourtant, la figure emblématique du fondateur, Frère Roger – Roger Schutz à l’état-civil (1915-2005) – reste, à bien des égards, méconnue.
Ce livre, première biographie historique de Frère Roger, voudrait échapper à la légende, non pour en prendre systématiquement le contre-pied, mais pour restituer toute une vie dans son contexte historique.
La tâche n’a pas été facile. Taizé n’aime ni l’histoire ni les archives et cultive un certain goût pour le secret ou le discret.
Les rencontres de Roger Schutz et de Max Thurian avec Pie XII et d’autres autorités romaines en 1949 et 1950 n’ont été connues du grand public qu’en 1960[1]. Frère Roger a choisi son successeur, frère Alois, dès 1978, au cours d’un voyage en Afrique, mais il ne l’annonce à sa communauté que vingt ans plus tard. La communion de Frère Roger à l’Eucharistie catholique, qu’il reçoit depuis 1972, n’apparaît au grand jour que lors de la messe des funérailles de Jean-Paul II, en 2005.
Et que dire de l’itinéraire religieux de son grand-père maternel : séminariste catholique jusqu’au sous-diaconat, puis prêtre dans l’Eglise vieille-catholique, avant d’être consacré pasteur réformé ? Frère Roger n’en a jamais parlé et, aujourd’hui encore à Taizé, c’est une sorte de tabou à ne pas transgresser.
La recherche de Frère Roger, nous avons essayé, ici, de la restituer au plus près. Sans nous arrêter à la « légende », mais aussi avec le souci de ne pas travestir la vérité d’un itinéraire exceptionnel.
Outre les volumes du Journal de Frère Roger, où, souvent, il faut savoir lire entre les lignes, d’autres sources permettent de reconstituer les diverses étapes de sa vie. Il y a, d’abord, les témoignages que nous avons pu recueillir auprès de certains membres de sa famille (par exemple, sa fille adoptive, Marie Strugala), auprès de frères ou d’anciens frères de la Communauté et auprès de ceux qui, catholiques, protestants ou orthodoxes, ont été les témoins de sa vie.
De nombreuses archives ecclésiastiques, institutionnelles ou privées, attendaient aussi l’historien, en France et en Suisse. Elles se sont avérées très riches, pleines de surprises et de documents précieux pour mieux saisir les décisions et les tentatives.
Frère Roger fut un « passeur » de frontières. Suisse, il s’installe en France en 1940. Calviniste, il fonde la première communauté monastique protestante en terre française. Fils de pasteur, pasteur lui-même, il est allé au-delà du protestantisme. « Il est formellement catholique » disait, en 2005, le cardinal Kasper, président du Conseil pontifical pour l’Unité des chrétiens, au cardinal Barbarin qui l’interrogeait sur l’appartenance confessionnelle de Frère Roger[2].
Il a toujours franchi les murailles pour aider et rassembler. En 1940-1942, il aide des réfugiés politiques et des Juifs ; en 1945-1946, il soulage deux camps de prisonniers de guerre allemands établis près de Taizé ; dans les années 1950-60, il est à la pointe du dialogue œcuménique ; dès 1966, il pressent une vague de contestation radicale dans la jeunesse d’Europe et il saura y voir une soif de questions. Et le reste de sa vie, il mettra en œuvre une pédagogie d’accompagnement de la jeunesse qui sera admirée par beaucoup et critiquée par certains.
Frère Roger appartient maintenant à l’histoire de l’Eglise mais aussi à l’histoire de l’Europe. Les Eglises, elles, ont vu en lui un rassembleur qu’elles n’ont pu tenir à l’écart, avec lequel elles ont entretenu un dialogue, parfois rude et difficile. Si Taizé, d’origine protestante, s’est rapproché du catholicisme, il y a eu un mouvement inverse : Taizé a influencé et le protestantisme et l’Eglise catholique.
(Extrait de l’introduction)
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[1] Le premier article qui évoque ces rencontres paraît dans le Monde le 27 octobre 1960.
[2] Lettre du cardinal Barbarin à l’auteur, le 23 février 2007.

samedi 9 février 2008

[Aletheia n°120] Réformes et restaurations, pas à pas - par Yves Chiron

Au regard de ses écrits et de ses actes antérieurs au pontificat, il était clair, dès le début, qu’en matière liturgique, Benoît XVI serait à la fois un réformateur et un restaurateur (cf. Aletheia, n° 74, 20 avril 2005).
Non pas seulement un réformateur du nouveau rite (la fameuse « réforme de la réforme ») et un restaurateur de l’ancien rite (le non moins fameux « droit de cité »), mais aussi un réformateur de l’ancien rite. Avec, au terme de ce double mouvement de réforme et de restauration, la fusion des deux rites.
Celui qui était le cardinal Ratzinger l’avait affirmé dans une lettre à son ami le professeur Barth : « le rite romain de l’avenir devra être un seul rite, célébré en latin ou en langue populaire, mais entièrement fondé dans la tradition du rite ancien » (lettre reproduite dans Aletheia, n° 89). Que cette perspective de l’unique rite soit à long terme, à très long terme même, celui qui est devenu Benoît XVI en a bien conscience lui qui sait aussi que le temps de l’Eglise ne s’apprécie pas avec la même mesure que le temps des affaires et des projets uniquement humains.
Quatre actes récents montrent ce double mouvement de réforme et de restauration :
• les éditions du Vatican ont créé une nouvelle collection « Monumenta Liturgica Piana » qui propose l’édition anastasique des livres liturgiques selon la dernière editio typica de 1962. Le Missale Romanum vient de paraître, suivra la réimpression du Rituale Romanum dans l’editio typica de 1952, du Pontificale Romanum dans l’editio typica de 1961-1962 et du Breviarium Romanum dans l’editio typica de 1962.
Le Missale Romanum qui vient d’être réédité n’est pas destiné aux fidèles. Par son format, c’est un missel d’autel, relié, avec notations musicales. Il est destiné aux prêtres, comme un prolongement naturel du motu proprio de juillet 2007[1].
• le 13 janvier 2008 dernier, dans la Chapelle Sixtine, Benoît XVI a célébré la messe (en italien), sur l’autel ancien, sous la fresque du Jugement dernier de Michel-Ange, « tourné vers le Seigneur » et non pas face au peuple comme l’usage s’en est répandu avec le nouveau rite.
Sans en faire une norme pour tous les prêtres, Benoît XVI a voulu mettre en acte, en tant que Souverain Pontife, une conviction spirituelle et théologique. Cette conviction, il l’avait exprimée, notamment, il y a plus de quinze ans, en préfaçant la traduction française de l’ouvrage de Mgr Klaus Gamber, Tournés vers le Seigneur (Editions Sainte-Madeleine, 84330 Le Barroux) : « L’orientation de la prière commune aux prêtres et aux fidèles – dont la forme symbolique était généralement en direction de l’est, c’est-à-dire du soleil levant – était conçue comme un regard tourné vers le Seigneur, vers le soleil véritable. Il y a dans la liturgie une anticipation de son retour ; prêtre et fidèles vont à sa rencontre. Cette orientation de la prière exprime le caractère théocentrique de la liturgie ; elle obéit à la monition : Tournons-nous vers le Seigneur ! ».
• Mgr Athanasius Schneider a publié, le 18 janvier, aux éditions du Vatican, un ouvrage consacré à la communion[2]. Mgr Albert Malcolm Ranjith, secrétaire de la Congrégation pour le Culte Divin, a accordé une préface à ce livre. Mgr Ranjith regrette que la pratique de distribuer la communion dans la main ait été « introduite abusivement et à toute vitesse dans certains milieux de l’Eglise tout de suite après le Concile. »
Cette pratique a banalisé l’acte de la communion, mais aussi a généralisé une attitude désinvolte ou irrespectueuse face à l’hostie consacrée elle-même. Mgr Ranjith estime nécessaire de « revoir » et « si nécessaire abandonner » la pratique de la communion dans la main.
Dès 1969, Jean Madiran avait analysé la « tromperie » du Processus de la communion dans la main[3] ; un processus qui a commencé avec l’instruction Memoriale Domini de la Congrégation pour le Culte divin, en date du 29 mai 1969. L’instruction procédait en trois temps. Elle faisait référence à une consultation des évêques du monde : ils s’étaient montrés très largement hostiles à la communion dans la main : 567 Placet contre 1.233 Non placet. Elle indiquait la position de Paul VI : « le Souverain Pontife n’a pas pensé devoir changer la façon traditionnelle de distribuer la sainte communion aux fidèles ». Mais, elle laissait aux Conférences épiscopales le soin d’autoriser « un usage différent », dans certaines conditions.
Cette autorisation exceptionnelle et conditionnelle de mai 1969 est devenue la norme universelle, sans éviter les risques redoutés par l’instruction elle-même : « manque de respect ou d’opinions fausses qui pourraient s’insinuer dans les esprits au sujet de la Très Sainte Eucharistie. »
L’alarme lancée par Jean Madiran en 1969 a trouvé, près de quarante ans plus tard (!), une première réponse dans la préface du secrétaire de la Congrégation pour le Culte Divin.
• La prière « pour la conversion des Juifs », qui figure parmi les oraisons du Vendredi saint, avait été modifiée dans l’editio typica du Missel de 1962 (les mots perfidis — incrédules – et perfidia – incrédulité – avaient été supprimés). Après le motu proprio de juillet dernier, des organisations juives avaient demandé que cette prière pro Iudaeis soit supprimée. Par un décret du 4 février, Benoît XVI ne supprime pas cette prière, mais il en rend obligatoire une nouvelle version : si les expressions auferat velamen de cordibus eorum et a suis tenebris eruantur sont supprimées, la conversion des Juifs est toujours demandée à Dieu : Ut Deus et Dominus noster illuminat corda eorum, ut agnoscant Iesum Christum salvatorem omnium hominum.
Précisions
• À propos du n° 118 : outre le P. Philippe Verdin, dominicain, il faut compter aussi au nombre des inspirateurs du « Discours du Latran », son amie, Emmanuelle Mignon, directrice de cabinet de Nicolas Sarkozy. Elle a tenu à le faire savoir au Figaro (16 janvier 2008).
• À propos du n° 119 : un lecteur, jésuite, a fait remarquer que les Jésuites ne sont plus 22.000 dans le monde mais « seulement 19.500 ». Il précise aussi que le noviciat français jésuite n’est pas « mixte » mais qu’ « il y a un internoviciat ignatien qui se réunit de temps à autre ». En d’autres termes, jeunes novices masculins jésuites et jeunes novices féminines de la famille ignatienne se retrouvent de temps en temps, pour quelques jours de « partage », de réflexion et de prière.
• Après le Discours du Latran (20 décembre 2007) à destination des catholiques et après le Discours de Riyad (le 14 janvier 2008) à destination des musulmans, il y aura le « Discours au Grand Orient de France » à destination des francs-maçons et des tenants de la laïcité. La date n’est pas arrêtée, mais Nicolas Sarkozy a accepté de venir s’exprimer lors d’une « tenue blanche fermée » devant le Grand Orient de France. Ce sera une première sous la Ve République de voir le Chef de l’Etat s’exprimer dans une loge maçonnique.
Y.C.
[1] Missale romanum. Edition typica (1962), Libreria Editrice Vaticana (00120 Città del Vaticano), 1.096 pages, 59 euros.
[2] Mgr Athanasius Schneider, Dominus Est, Libreria Editrice Vaticana, 2008, 8 euros.
[3] Jean Madiran, « Le processus de la communion dans la main », Itinéraires, n° 135, juillet-août 1969.