vendredi 2 mars 2001

[Aletheia] Une notification de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi - Renforcement de la Commission Pontificale Ecclesia Dei - Revue des revues

Yves Chiron - Aletheia n°10 - 2 mars 2001

I. Une notification de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi (document).

II. Renforcement de la Commission Ecclesia Dei.

III. Revue des revues.


Une notification de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi

La récente Déclaration Dominus Jesus “ sur l’unicité et l’universalité salvifique de Jésus-Christ et de l’Eglise ” publiée par la Congrégation pour la doctrine de la Foi en 2000 [AAS, 92 (2000), 742-765] réfutait des erreurs répandues dans certains milieux et dans certains écrits. Etait visé, notamment, sans être nommé explicitement, l’ouvrage publié par le père Jacques Dupuis, s.j., ancien professeur à l’Université grégorienne : Vers une théologie chrétienne du pluralisme religieux (Paris, Cerf, 1997).

Aujourd’hui, de manière plus explicite, la même Congrégation publie une Notification concernant directement ce livre. Estimant que l’ouvrage contient “ de graves ambiguïtés et des difficultés sur des points doctrinaux qui peuvent conduire le lecteur à des opinions erronées ou dangereuses ”, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi publie une mise au point doctrinale qui a été approuvée par Jean-Paul II durant l’audience du 21 novembre 2000 et confirmée le 19 janvier 2001.

Le père Jacques Dupuis, dit la Notification, “ s’est engagé à reconnaître les thèses énoncées et à s’en tenir à l’avenir, dans ses activités théologiques et ses publications, aux contenus doctrinaux indiqués ”. Il s’est engagé aussi à faire figurer la Notification de la Congrégation pour la Doctrine de la foi dans toute réédition, réimpression et traduction de son ouvrage.

Voici les cinq points doctrinaux rappelés par la Notification (dont on trouvera le texte intégral sur le site internet du Vatican et, bientôt, dans la Documentation catholique) :

I. A propos de la médiation salvifique unique et universelle de Jésus-Christ

1. Il faut croire fermement que Jésus-Christ, Fils de Dieu fait homme, crucifié et ressuscité, est le médiateur unique et universel du salut de toute l’humanité.

2. Il faut aussi croire fermement que Jésus de Nazareth, Fils de Marie et seul Sauveur du monde est le Fils et le Verbe du Père. En raison de l’unité du plan divin de salut, qui a son centre en Jésus-Christ, il faut tenir en outre que l’oeuvre salvifique du Verbe est accomplie dans et par Jésus-Christ, Fils incarné du Père, en tant que médiateur du salut de toute l’humanité. Il est donc contraire à la foi catholique non seulement d’affirmer une séparation entre le Verbe et Jésus ou une séparation entre l’action salvifique du verbe et celle de Jésus, mais aussi de soutenir la thèse d’une action salvifique du verbe comme tel dans sa divinité, indépendamment de l’humanité du Verbe incarné.

II. A propos de l’unicité et de la plénitude de la révélation de Jésus-Christ

3. Il faut croire fermement que Jésus-Christ est le médiateur, l’accomplissement et la plénitude de la révélation. Il est donc contraire à la foi de l’Eglise de soutenir que la révélation par/en Jésus-Christ soit limitée, incomplète ou imparfaite. En outre, même si on ne possédera la pleine connaissance de la vérité divine qu’au jour de la venue glorieuse du Seigneur, la révélation historique de Jésus-Christ offre tout ce qui est nécessaire pour le salut de l’homme et n’a pas besoin d’être complétée par d’autres religions.

4. Il est conforme à la doctrine catholique d’affirmer que les graines de vérité et de bonté qui se trouvent dans les autres religions participent d’une certaine manière aux vérités contenues par/en Jésus-Christ. Par contre, considérer que ces éléments de vérité et de bonté, ou certains d’entre eux, ne dérivent pas ultimement de la méditation-source de Jésus-Christ, est une opinion erronée.

III. A propos de l’action salvifique universelle de l’Esprit Saint

5. La foi de l’Eglise enseigne que l’Esprit Saint, à l’oeuvre après la résurrection de Jésus Christ, est encore l’Esprit du Christ envoyé par le Père qui opère de manière salvifique aussi bien dans les chrétiens que dans les non-chrétiens. Il est donc contraire à la foi catholique de considérer que l’action salvifique de l’Esprit Saint puisse s’étendre au-delà de l’unique économie salvifique universelle du Verbe incarné.

IV. A propos de l’ordination de tous les hommes à l’Eglise

6. Il faut croire fermement que l’Eglise est signe et instrument de salut pour tous les hommes. Il est contraire à la foi catholique de considérer les diverses religions du monde comme des voies complémentaires à l’Eglise pour ce qui est du salut.

7. Selon la doctrine catholique, les adeptes des autres religions sont eux aussi ordonnés à l’Eglise et sont tous appelés à en faire partie.

V. A propos de la valeur et de la fonction salvifique des traditions religieuses

8. Selon la doctrine catholique, il faut tenir que “ ce que l’Esprit fait dans le coeur des hommes et dans l’histoire des peuples, dans les cultures et les religions, remplit une fonction de préparation évangélique (cf. Const. dogm. Lumen gentium, n. 16) ”. Il est donc légitime de soutenir que l’Esprit Saint pour sauver les non-chrétiens, utilise aussi les éléments de vérité et de bonté qui se trouvent dans les diverses religions, mais considérer comme voie de salut ces religions, prises comme telles, n’a aucun fondement dans la théologie catholique ; en effet, elles présentent des lacunes, des insuffisances et des erreurs sur les vérités fondamentales regardant Dieu, l’homme et le monde.

En outre, le fait que les éléments de vérité et de bonté des différentes religions puissent préparer les peuples et les cultures à accueillir l’événement salvifique de Jésus-Christ, ne suppose pas que les textes sacrés des autres religions puissent être considérés comme complémentaires à l’Ancien Testament, qui est la préparation immédiate à l’évènement du Christ.

Cette Notification est uniquement consacrée aux religions non-chrétiennes ; alors que Domini Jesus évoquait aussi les confessions non-catholiques et l’oecuménisme. Cette Notification, si elle est une critique de certaines tendances actuelles de la théologie des religions, peut aussi être lue comme une clarification de certains actes de Jean-Paul II. Des initiatives spectaculaires, et contestées, comme la rencontre des religions à Assise, le 27 octobre 1986, doivent être interprétées à la lumière de cette Notification qu’il sera difficile d’accuser de syncrétisme.

II. Renforcement de la Commission Pontificale Ecclesia Dei

La Commission avait été instituée par le motu proprio Ecclesia Dei du 2 juillet 1988 “ pour faciliter la pleine communion ecclésiale des prêtres, séminaristes, communautés ou simples religieux et religieuses jusque là liés de quelque manière à la Fraternité fondée par Mgr Marcel Lefebvre, et qui souhaitent restés unis au Successeur de Pierre dans l’Eglise Catholique. ”

Depuis avril 2000, cette Commission est présidée par le cardinal Dario Castrillon Hoyos, préfet de la Congrégation pour le clergé. Ses deux initiatives les plus spectaculaires ont été, jusqu’ici, ses interventions dans la vie interne de la Fraternité Saint-Pierre (avec la nomination d’un nouveau supérieur) et l’ouverture de discussions avec la Fraternité Saint-Pie X (discussions non achevées à ce jour).

Le samedi 24 février, Jean-Paul II a institué un conseil de quatre membres qui viendra assister le Président de la commission. Ce conseil est composé du cardinal Joseph Ratzinger, préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi ; du cardinal Jorge Medina Estevez, préfet de la Congrégation pour le culte divin ; du cardinal Louis-Marie Billé, archevêque de Lyon et de Mgr Julian Herranz, président du Conseil pontifical pour l’interprétation des textes législatifs.

Ce renforcement notable de la Commission Ecclesia Dei et la présence, pour la première fois, d’un Français dans ses organes de direction, ne sont sans doute pas sans rapport avec les discussions ouvertes actuellement avec la Fraternité Saint-Pie X.

III. Revue des revues

. Pio IX (Palazzo dei Canonici, 00120 Cité du Vatican), la revue de la postulation du bienheureux Pie IX publie, en un numéro spécial de 125 pages, les actes du symposium international qui s’est tenu à Rome le 14 septembre 2000 :

- cardinal Vincenzo Fagiolo La santità di Pio IX ed il suo messagio oggi ;

- cardinal Alfons Maria Stickler, Due perle del Pontificato di Pio IX : l’Immacolata Concezione e l’Infaillibilità Papale ;

- Walter Brandmüller, Il concilio Vaticano I nella storiografia ;

- Francesco Leoni, Pio IX e la storiografia italiana ;

- Yves Bruley, Pie IX vu par les Français : itinéraire dans les sources et l’historiographie ;

- Yves Chiron, Pie IX et la Franc-Maçonnerie.

. Certitudes (23 bis rue des Bernardins, 75005 Paris) publie dans le n° 4 de sa nouvelle série (128 pages, 50 F), un très abondant dossier consacré à “ La gnose éternelle, hérésie et nouvelle religion ”. Par rapport aux élucubrations que l’on a pu lire depuis de nombreuses années dans plusieurs publications traditionalistes, on a là une série d’approches sérieuses et d’un grand intérêt. Sous la plume de Paul Sernine (pseudonyme d’un ecclésiastique, semble-t-il) on trouve une magistrale réfutation de la notion de “ gnose ” qu’ont diffusée Etienne Couvert et ses (défunts) Cahiers Barruel. On appréciera, entre autres, l’étude de la pensée de F. Schuon par l’abbé Christophe Héry qui montre qu’il s’agit, en fait, d’une pensée de l’immanence. Intéressant aussi le témoignage de deux “ rescapés d’une secte gnostique ”.

Si la justice est de à rendre à chacun ce qui lui est dû, il semble que cette définition soit inconnue de certaines publications catholiques. Coup sur coup, l’une reproduit intégralement un document publié par Alètheia sans citer sa source ; l’autre reprend dans un article tous les éléments d’information parus dans Alètheia n° 8, p. 1 à 3, y compris certains détails significatifs, sans citer, elle non plus, sa source.

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