dimanche 18 septembre 2005

[Aletheia n°81] Rome et la FSSPX en dialogue

Aletheia n°81 - 18 septembre 2005

Rome et la FSSPX en dialogue

Outre une conférence devant des prêtres de la Fraternité Saint-Pie X, Mgr Fellay a rendu compte de sa rencontre avec Benoît XVI dans un entretien accordé à DICI (www.dici.org) et publié le 17 septembre. En voici la reproduction intégrale :

"Le devoir de faire reconnaître la place de la Tradition dans l’Église"

DICI : Monseigneur, vous avez demandé au pape Benoît XVI une audience qui a eu lieu le 29 août dernier. Quel était le sens de votre démarche ?

Mgr Fellay : Nous avons souhaité rencontrer le Saint-Père parce que nous sommes catholiques et que, comme tout catholique, nous sommes attachés à Rome. En demandant cette audience nous voulions montrer que nous sommes catholiques. Tout simplement.

Notre reconnaissance du pape ne se limite pas seulement à la mention de son nom au canon de la messe par tous les prêtres de la Fraternité Saint-Pie X. Il est normal que nous marquions notre déférence en tant que catholiques romains. Catholique veut dire universel, et le Corps mystique de l’Église ne se réduit pas à nos chapelles.

Il y a également de notre part le dessein de rappeler au nouveau Souverain Pontife l’existence de la Tradition ; le souci de lui rappeler que la Tradition c’est l’Église et que nous incarnons de façon tout à fait vivante la Tradition de l’Église. Nous voulons montrer que l’Église serait plus forte dans le monde d’aujourd’hui si elle maintenait la Tradition. Ainsi nous souhaitons apporter notre témoignage : si l’Église veut sortir de la crise tragique qu’elle traverse, la Tradition est une réponse, voire la seule réponse à cette crise.

DICI : Comment s’est déroulée cette audience ?

Mgr Fellay : L’audience a eu lieu dans la résidence d’été des papes à Castel Gandolfo. Prévue à 11 h 30, elle a débuté effectivement à 12 h 10 dans le bureau du Souverain Pontife. Celui-ci accorde habituellement une audience de quinze minutes à un évêque. Pour nous cela a duré trente-cinq minutes. Cela signifie, disent les spécialistes du Vatican, que Benoît XVI a voulu montrer l’intérêt qu’il porte à ces questions.

Nous étions quatre : le Saint-Père et le cardinal Castrillon Hoyos, l’abbé Schmidberger et moi. La conversation s’est déroulée en français - contrairement à certaines sources qui annonçaient qu’elle se tiendrait en allemand - ; elle a été conduite par le pape dans une atmosphère bienveillante. Lui-même a énoncé trois difficultés en réponse à la note que nous lui avions fait parvenir un peu avant l’audience. Benoît XVI en avait pris connaissance et il n’a pas été nécessaire de reprendre les points évoqués dans cette note.

Nous y faisions une description de l’Église en citant "l’apostasie silencieuse" de Jean-Paul II, "le bateau qui prend l’eau de toute part" et "la dictature du relativisme" du cardinal Joseph Ratzinger, avec en annexe des photos de messes toutes aussi scandaleuses les unes que les autres.

Nous donnions également une présentation de la Fraternité avec des chiffres et diverses réalisations. Nous citions deux exemples d’actions menées par la Fraternité dans le monde actuel et l’attitude invraisemblable des épiscopats locaux à leur endroit : le procès en Argentine qui obtint l’interdiction de la vente des contraceptifs, qui nous vaut le qualificatif de terroristes de la part de l’évêché de Cordoba, et la dénonciation de la gay-pride de Lucerne qui se termina dans une église catholique par un office protestant dans l’indifférence totale de l’évêque.

Enfin nous formulions nos demandes : changer le climat d’hostilité à l’égard de la Tradition, climat qui rend la vie catholique traditionnelle - y en a-t-il une autre ? - à peu près impossible dans l’Église conciliaire, en donnant une pleine liberté à la messe tridentine, faire taire le reproche de schisme en enterrant les prétendues excommunications, et trouver une structure d’Église pour la famille de la Tradition.

DICI : Est-il possible de connaître les difficultés soulevées par Benoît XVI ?

Je peux seulement les évoquer. Dans un premier temps, le Saint Père a insisté sur la reconnaissance effective du pape et l’a reliée à la situation de nécessité invoquée pour le sacre des évêques par Mgr Lefebvre et pour notre activité subséquente.

Ensuite Benoît XVI a précisé qu’il n’y avait qu’une manière d’être dans l’Église catholique : c’est d’avoir l’esprit de Vatican II interprété à la lumière de la Tradition, c’est-à-dire dans l’intention des pères du concile et selon la lettre des textes. C’est une perspective qui nous effraie passablement…

Enfin il nous faudrait, pense le Souverain Pontife, une structure qui nous convienne pour le rite traditionnel et certaines pratiques extérieures, - sans pour autant nous protéger de l’esprit du concile que nous devrions adopter.

DICI : Le communiqué du Vatican à l’issue de l’audience parle d’une "volonté de procéder par étapes et dans des délais raisonnables". Que faut-il entendre par cette expression ?

Mgr Fellay : Le pape n’a pas voulu aborder les problèmes, mais simplement les esquisser. Or il faudra bien, dans un premier temps, répondre à l’exigence du droit de cité de l’ancienne messe pour ensuite aborder les erreurs du concile, car nous y voyons la cause des maux actuels, cause directe et pour une part indirecte.

Bien sûr, nous irons pas à pas. Il faut apporter sur le concile un éclairage différent de celui qui est donné par Rome. Tout en dénonçant les erreurs, il est indispensable de montrer leur suite logique, leur incidence sur la situation désastreuse de l’Église aujourd’hui, sans toutefois provoquer une exaspération qui entraînerait une rupture de la discussion. Cela nous oblige donc à procéder par étapes.

À propos des délais raisonnables, il se dit à Rome que des documents pour les communautés rattachées à la Commission Ecclesia Dei sont en préparation, quelque chose de nouveau, du jamais vu encore. "Attendons et voyons !" Il est certain que le pape a la volonté de régler rapidement cette situation.

Pour être tout à fait juste, je voudrais apporter ici une précision. En effet, il faut bien considérer la situation dans laquelle se trouve le pape. Il est coincé entre les progressistes et nous : s’il vient à libéraliser la messe sur notre seule demande, les modernistes se dresseront en disant que le pape a cédé aux traditionalistes. Nous apprenions ainsi de Mgr Ricard qu’en 2000, lui-même, le cardinal Lustiger et l’archevêque de Lyon s’étaient précipitamment rendus à Rome pour bloquer toute avance faite à la Fraternité, en brandissant la menace d’une rébellion. Nous savons que les évêques allemands ont agi de la même manière lors des J.M.J. de Cologne : "C’est eux ou nous". Il faut comprendre : "S’ils sont reconnus, nous sortons de l’Église et nous faisons schisme".

De telle sorte que le pape ne pouvait pas, au cours de l’audience, nous donner verbalement l’assurance qu’à l’automne, par exemple, la messe serait libéralisée. Toute promesse de sa part faite à la Fraternité en ce sens l’exposerait infailliblement à la pression exercée par les progressistes. Nous aurions alors recueilli les vues d’un pape contre une majorité d’évêques enclins à la sécession. Cela n’est pas envisageable dans la débâcle actuelle, même avec la volonté d’une certaine restauration. Pour ma part, je pense que seule une libéralisation limitée sera éventuellement concédée.

DICI : La presse s’est fait l’écho de divisions au sein de la Fraternité Saint Pie X. Qu’en est-il précisément ?

Mgr Fellay : L’annonce de cette audience accordée par le pape a provoqué un véritable tumulte dans les médias. Ils ont fait beaucoup de bruit, tentant de montrer des divisions dans la Fraternité parmi les quatre évêques. Les journalistes ont également propagé les menaces adressées au pape par les progressistes : "Libérer la messe c’est désavouer Paul VI et la réforme liturgique".

Mais je puis vous affirmer qu’à l’intérieur de la Fraternité Saint Pie X les quatre évêques sont à l’unisson au sujet des rapports avec Rome, et que Mgr Williamson, dont le nom a été cité, n’est pas "sédévacantiste". Les médias n’ont pas d’inquiétude à avoir. Malheureusement pour eux, c’est un hors sujet !

DICI : Monseigneur, qu’espérez-vous maintenant ?

Mgr Fellay : Il y a une espérance chez certains cardinaux à Rome de voir la Tradition reconnue. Nous l’espérons également. Nous espérons en particulier une entière libéralisation de la messe, mais cela risque fort de ne pas être pour demain. Nous aurons alors le devoir de faire reconnaître la place de la Tradition dans l’Église, en évitant de susciter les mauvaises interprétations que l’on donne d’elle.

Il faudra faire admettre aux autorités romaines que nous ne pouvons suivre sans de sérieuses restrictions l’interprétation que l’on donne du concile et l’œcuménisme tel qu’il est pratiqué. Au fond, ce que nous espérons, c’est de faire comprendre un jour la raison d’être de la Tradition.


Le jour même où étaient connues ces déclarations de Mgr Fellay, un autre évêque de la FSSPX, Mgr Williamson, rendait publiques des “ Réflexions pour le mois de septembre ” (texte original anglais et “ version française par l’auteur ” disponibles sur qien.free.fr).

Ces “ Réflexions ” se terminent ainsi : “ …tant que les autorités de notre Mère, l’Église, souffrent la lèpre de l’hérésie néo-moderniste, prions Dieu pour que nous gardions l’équilibre juste, en nous éloignant d’eux ni trop peu, car ils ont la lèpre, ni trop, car l’Église reste notre Mère. C’est un équilibre délicat, mais les quatre évêques de la Fraternité entendent unanimement le garder. Dieu aidant, et sa Très Sainte Mère. ”

Y A-T-IL ENCORE UN “ ETAT DE NECESSITE ” ?

Sans prétendre commenter ces déclarations épiscopales, et encore moins s’immiscer dans un dialogue que le Saint-Père a accepté de réengager, on relèvera quelques points des réponses de Mgr Fellay à DICI :

• L’attachement à Rome et la reconnaissance de l’autorité du Souverain Pontife sont affirmés d’emblée par le Supérieur général de la FSSPX. C’est un rappel de doctrine et de discipline qui, semble-t-il, n’est pas destiné seulement à rassurer le Saint-Siège. Il s’adresse aussi, sans doute, aux prêtres de la FSSPX qui refusent de mentionner le nom du pape au canon de la messe. Ces prêtres “ non una cum ” sont une minorité au sein de la FSSPX – Mgr Lefebvre, en son temps, avait sanctionné ceux qui refusaient de nommer le pape au canon. Mais les fidèles qui assistent à la messe dans un prieuré de la FSSPX ne savent pas, parfois, si le pape est nommé ou non dans le canon.

• Mgr Fellay indique que Benoît XVI a évoqué, dès les débuts de l’entretien, “ la situation de nécessité invoquée pour le sacre des évêques par Mgr Lefebvre ”.

En effet, l’argument de nécessité était revenu souvent, lors de l’ “ année climatérique ” (J. Madiran), dans les déclarations de Mgr Lefebvre pour justifier les sacres épiscopaux qu’il allait accomplir :

“ la Fraternité et son histoire manifestent publiquement cette nécessité de la désobéissance pour demeurer fidèles à Dieu et à l’Église ” (Lettre aux anciens du Séminaire d’Ecône, le 29 mars 1988) ;

“ la nécessité absolue d’avoir des autorités ecclésiastiques qui épousent nos préoccupations et nous aident à nous prémunir contre l’esprit de Vatican II et l’esprit d’Assise ” (Lettre au pape, le 2 juin 1988) ;

“ la nécessité absolue de la permanence et de la continuation du sacrifice adorable de Notre Seigneur pour que ”son Règne arrive” ” (Lettre aux futurs évêques, le 29 août 1987, rendue publique en juin 1988).

Cette nécessité – au sens philosophique, opposé à contingence – était définie aussi par Mgr Lefebvre comme une “ contrainte par la Providence ”.

Aujourd’hui, Benoît XVI affirme à Mgr Fellay que l’argument de l’état de nécessité ne peut plus être employé pour justifier la désobéissance et la séparation.

• La “ structure d’Église ” à accorder à la FSSPX, c’est-à-dire le statut canonique à lui reconnaître, ne semble pas poser un problème insurmontable. Une plus grande libéralisation de la messe traditionnelle semble aussi, selon d’autres sources, pouvoir intervenir lors du prochain synode sur l’Eucharistie, en octobre prochain.

Reste la question du concile Vatican II. Benoît XVI a affirmé, rapporte Mgr Fellay, “ qu’il n’y avait qu’une manière d’être dans l’Église catholique : c’est d’avoir l’esprit de Vatican II interprété à la lumière de la Tradition ”. “ Perspective ” effrayante commente Mgr Fellay.

On remarquera, néanmoins, que Mgr Fellay ne rejette pas tout le concile Vatican II en tant que tel. Il parle certes des “ erreurs du concile ” mais aussi, d’une manière plus limitée, des “ sérieuses restrictions ” à faire à “ l’interprétation ” du concile. L’abbé Schmidberger, premier assistant général de la FSSPX et qui participait à la rencontre du 29 août, avait évoqué déjà “ beaucoup de déformations nées du concile Vatican II et à une certaine façon de comprendre l’œcuménisme et la liberté de religion ” (déclaration à l’agence APIC le 30 août 2005). “ Mauvaise interprétation ” et “ déformations ” ne signifient pas rejet entier.

On en reviendrait ainsi à un des points de l’accord, éphémère, du 4 mai 1988 : “ À propos de certains points enseignés par le concile Vatican II […] et qui nous paraissent difficilement conciliables avec la Tradition, nous nous engageons à avoir une attitude positive d’étude et de communication avec le Siège apostolique, en évitant toute polémique. ”

jeudi 1 septembre 2005

[Aletheia n°80] Un évêque dominicain pour le diocèse de Saint-Claude + autres textes

Aletheia n°80 - 1er septembre 2005

Un évêque dominicain pour le diocèse de Saint-Claude

Fin août, Benoît XVI a nommé le Père Jean Legrez, dominicain, évêque du diocèse de Saint-Claude, dans le Jura. Le siège était vacant depuis plus d’un an.
Cette nomination est significative des choix, en profondeur, de Benoît XVI, eu égard à la situation française. Elle est significative aussi de l’accession aux responsabilités dans l’Eglise d’une génération post-conciliaire, qui a souffert de la crise de l’Eglise. Le parcours de Mgr Legrez est, en effet, atypique.
Né en 1948 à Paris, il a effectué ses études primaires et secondaires au Collège Saint-Jean de Passy (où il a été le condisciple du futur Père Louis-Marie de Blignières). Il était adolescent au moment du concile Vatican II. Il a vécu les “ événements ” de mai 68 à l’Université de Nanterre, où il effectuait des études de lettres modernes.
Entré ensuite chez les Dominicains, il a reçu sa formation religieuse, philosophique et théologique dans différents couvents de son ordre (Lille, Strasbourg, Paris et Toulouse), avec un passage d’une année à l’Ecole biblique de Jérusalem.
Il a été ordonné prêtre le 27 juin 1976 à Toulouse. Il a d’abord été vicaire de la paroisse qui dépendait du couvent de Toulouse. Mais, dès 1977, il quittait l’ordre dominicain, avec le P. Jean-Miguel Garrigues, qui avait été son professeur de théologie dogmatique patristique[1].
Cette rupture d’avec l’ordre dominicain est une illustration de la crise polymorphe de la quinzaine d’années qui a suivi le concile Vatican II. L’ordre dominicain, comme quasiment tous les ordres religieux, au moins en France, traversait depuis des années un maëlstrom qui bouleversait tout. À cette même époque, estimant que l’ordre dominicain tel qu’il était en France n’était plus fidèle à ses constitutions fondatrices et à l’esprit de saint Dominique, des groupes d’inspiration dominicaine se fondaient de manière autonome : en octobre 1975 à Clamart, en 1979 à Chémeré[2].
Le P. Legrez et le P. Jean-Miguel Garrigues ne vont pas, eux, vouloir refonder en s’inspirant de l’idéal dominicain. Ils vont participer à la fondation de plusieurs fraternités monastiques dans différentes villes : en 1977 à Aix-en-Provence, en 1980 en Avignon, à Lyon, enfin, à partir de 1983. À Lyon, la Fraternité monastique était installée à la paroisse Saint-Nizier dont le P. Legrez sera nommé curé.
Ces fraternités monastiques paroissiales étaient de petites communautés où se conjuguaient observances monastiques, office choral dans l’église paroissiale (donc ouvert aux fidèles), et vie apostolique, marquée notamment par un accompagnement spirituel des fidèles. Un certain nombre de fidèles, dont le signataire de ces lignes, ont trouvé, auprès de ces moines dans la ville, un soutien et un enseignement spirituels qui ont été déterminants dans leur vie.
Cette forme nouvelle de vie religieuse et d’apostolat –  des “ moines urbains ” –  renouait, en fait, avec une forme très ancienne du monachisme qui, à l’origine, ne fut pas vécu uniquement dans la solitude du désert. À cette époque, Jean-Miguel Garrigues et Jean Legrez ont étudié, d’un point de vue historique et théologique, cette tradition monastique dans un livre : Moines dans l’assemblée des fidèles. À l’époque des Pères. IVe -VIIIe siècle, (Beauchesne, 1992).
En1996, la Fraternité monastique lyonnaise a fermé ses portes. Jean-Miguel Garrigues a rejoint la Congrégation Saint-Jean du P. Marie-Dominique Philippe, Jean Legrez est revenu dans l’ordre dominicain.
Ce retour dans l'ordre des Frères prêcheurs, près de vingt ans après en être parti, illustre combien l’ordre dominicain avait changé. La situation des ordres religieux, comme la situation de l’Eglise en général, n’est plus la même depuis les années de crise des années 60 et 70. Il n’y a certes pas eu restauration à l’identique, et, pour s’en tenir à la situation française, d’une congrégation à l’autre, la situation est très différente.
Revenu dans l’ordre dominicain, le P. Legrez a résidé depuis 1996 au couvent Saint-Lazare de Marseille, dont il est devenu sous-prieur en 1998, prieur en 2001 (réélu en 2004). La présence dominicaine à Marseille est redevenue visible et active, par la restauration du couvent, par l’habit blanc retrouvé, par la prédication, par la vie liturgique communautaire ouverte aux fidèles (laudes, messe, vêpres, complies), par des “ conférences du mardi ”.
La nomination du P. Legrez comme évêque de Saint-Claude l’a surpris, il l’a écrit lui-même dans sa première lettre aux prêtres de son diocèse. Le grand quotidien régional l’Est Républicain, en annonçant, le 23 août dernier, la nomination du nouvel évêque de Saint-Claude, jugeait qu’il appartient à la “ mouvance traditionnelle de l’Eglise ”. L’intéressé ne se reconnaîtra pas vraiment dans cette qualification. Il n’est certainement pas traditionaliste (à Lyon, les liturgies en français de sa Fraternité monastique, attiraient beaucoup de fidèles par le sens du sacré et du surnaturel qu’elles manifestaient, mais elles déplaisaient aux catholiques attachés au rite traditionnel). Si on voulait à tout prix lui accoler une étiquette, forcément réductrice, on le qualifierait, plus volontiers, de “ patristique ”, par son désir et sa pratique de ressourcement aux Pères de l’Eglise.
Le diocèse de Saint-Claude est un de ces diocèses, de moins en nombreux, où il n’y a pas de célébration régulière de la liturgie traditionnelle dans le cadre du motu proprio de 1988, ni de prieuré de la Fraternité Saint-Pie X. Les fidèles du diocèse attachés au rite traditionnel trouveront très certainement auprès de leur nouvel évêque un accueil bienveillant et attentif.
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Rome – FSSPX : Le “ dialogue ” renoué

À la vérité, le “ dialogue ” n’a jamais été rompu entre la Fraternité Saint-Pie X et le Saint-Siège. Il y a toujours eu, de part et d’autre, des contacts informels, non officiels. J’ai signalé, trois fois déjà, qu’un des responsables de la Fraternité Saint-Pie X avait renoué un contact direct avec le futur pape Benoît XVI dans la période de l’avant-conclave.  De Menzingen, on m’assure qu’un tel contact direct n’a pas eu lieu à ce moment-là. Disons alors que de tels contacts, privés, ont eu lieu avant la mort de Jean-Paul II.
Il est avéré, également, que depuis l’avènement de Benoît XVI, plusieurs prêtres de la FSSPX ont pris contact avec le Saint-Siège ou avec le pape lui-même, à titre privé ou en vue de la rencontre au grand jour qui a eu lieu le 29 août[3].
Ce jour-là, Benoît XVI, en présence du cardinal Castrillon Hoyos, a reçu, à Castel Gandolfo, Mgr Fellay, Supérieur général de la Fraternité Saint-Pie X, accompagné de l’abbé Schmidberger, Premier assistant général de la FSSPX, et qui entretenait des relations suivies avec le cardinal Ratzinger avant qu’il n’accède au Souverain Pontificat.
Sur la rencontre du 29 août, parmi le flot des commentaires, des informations, des approximations et des erreurs[4] qui ont déferlé, il n’est pas inutile de publier intégralement les communiqués qui, de part et d’autre, ont été publiés pour en rendre compte :
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Saint-Siège: Déclaration du Directeur de la salle de Presse
Le Saint-Père Benoît XVI a reçu ce matin dans le Palais apostolique de Castel Gandolfo, le Supérieur Général de la "Fraternité Saint-Pie X", Mgr Bernard Fellay, qui en avait fait la demande. Le Pape était accompagné de son Eminence le Cardinal Darío Castrillón Hoyos, Président de la Commission Pontificale "Ecclesia Dei".
La rencontre s’est déroulée dans un climat d’amour pour l’Eglise et le désir d’arriver à une parfaite communion.
Bien qu’ils soient conscients des difficultés, a été manifestée la volonté de procéder par étapes et dans des délais raisonnables.
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Fraternité Saint-Pie X - Déclaration de Mgr Fellay
 La rencontre a duré environ 35 minutes, elle s’est déroulée dans un climat serein. 
 L’audience a été l’occasion pour la Fraternité de manifester qu’elle a toujours été attachée - et qu’elle le sera toujours - au Saint-Siège, la Rome éternelle. 
 Nous avons abordé les difficultés sérieuses, déjà connues, dans un esprit de grand amour pour l’Église. 
 Nous sommes arrivés à un consensus sur le fait de procéder par étapes dans la résolution des problèmes. 
 La Fraternité Saint Pie-X prie afin que le Saint Père puisse trouver la force de mettre fin à la crise de l’Église en ''restaurant toutes choses dans le Christ''. 
+Bernard Fellay
Supérieur Général de la Fraternité Saint-Pie X
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Précisions
•  Suite à notre dernier numéro où était publiée la “ Lettre d’un catholique perplexe ”, une lectrice, éminente spécialiste du Moyen-Orient et du monde musulman, s’est étonnée des propos de Jean-Paul II qui y étaient cités. “ Puisse saint Jean-Baptiste protéger l’Islam  ! ”, cette invocation est contenue dans la prière sur les bords du Jourdain, lors du voyage en Terre sainte et en Egypte de mars 2000 : le texte intégral a été publié dans La Documentation catholique, 16.04.2000, page 362.
 L’exhortation aux musulmans : “ Vivez votre foi, même en terre étrangère ”, a été lancée à Mayence, lors du voyage apostolique en Allemagne le 17 novembre 1980. Ce discours n’a pas été traduit en français, mais se trouve dans les discours de Jean-Paul II tels que les publie le site officiel du Saint-Siège.
•  La revue des religieux d’Avrillé, Le Sel de la Terre (Couvent de la Haye-aux-Bonshommes, 49240 Avrillé) publie un épais numéro de 450 pages tout entier consacré à Fatima. À côté d’articles intéressants, et même utiles, par exemple sur la dévotion réparatrice des cinq premiers samedis du mois, on trouve de nombreux articles de polémique pour répandre l’idée :
- que la consécration de la Russie faite en 1984 par Jean-Paul II ne correspond pas à ce que la Sainte Vierge a demandé lors de ses apparitions.
- que les propos tenus par Sœur Lucie, en 1992 devant le cardinal Padiyara, et, en 1993, devant le cardinal Vidal, – entretiens publiés en français sous le titre Fatima. Sœur Lucie témoigne, Editions du Chalet, 1999 – ne peuvent être authentiques puisque Sœur Lucie y affirme que la consécration de 1984 a répondu au désir du Ciel.
- Que le 3e secret de Fatima (3e partie du secret plutôt) révélé en 2000 ne correspond pas au texte authentique, qui resterait inconnu, et que l’interprétation qu’en a donnée alors le Saint-Siège est une “ trahison ”.
- Que les autorités du sanctuaire de Fatima et les autorités diocésaines veulent construire un “ temple œcuménique ” sur le lieu des apparitions.
En contrepoint à ce dossier, on rappellera simplement, fait déjà signalé ici, que des enregistrements audio et vidéo des entretiens de 1992 et 1993 avaient été effectués. Le 31 janvier 2002, en Italie, sur “ Raidue ”, l’entretien de 1993 a été diffusé. Des millions d’Italiens ont pu entendre les propos de Sœur Lucie. Les rédacteurs d’Avrillé diront-ils que c’est une “ fausse Sœur Lucie ” que l’on entendait ?
[1] Le P. Garrigues avait publié, l’année précédente, un bel essai, issu de sa thèse de doctorat en théologie : Maxime le Confesseur. La charité, avenir divin de l’homme, Beauchesne, 1976.
[2] Le groupe de Clamart restera toujours lié à la Fraternité Saint-Pie X. De ce groupe est issu, à Avrillé, en Anjou, le Couvent de la Haye-aux-Bonhommes, qui se revendique de la tradition dominicaine. La communauté de Chémeré, en Mayenne, après être passée par le sédévacantisme, sera reconnue, sous le nom de Fraternité Saint-Vincent-Ferrier, comme Institut religieux de droit pontifical en 1988 et a vu ses Constitutions définitives être approuvées par le Saint-Siège en 1995.
[3] Au quotidien italien Il Giornale, le 30 août, au lendemain de la rencontre, M. l’abbé Schmidberger a précisé que, ces deux derniers mois, il avait rencontré différents cardinaux et chefs de dicastère : “ Nous avons fait parvenir des demandes, des explications, des contributions, des demandes relatives à la réforme liturgique et à l’œcuménisme ”.
[4] Le Figaro, par son correspondant au Vatican, Hervé Yannou, nous dit que si les 4 évêques de la FSSPX “ rentraient dans le giron de l’Eglise, ils devraient normalement y retrouver leur ancienne place de prêtre ” ; Golias, dans un communiqué spécial, évoquant les prêtres “ exclus ” de la FSSPX ces derniers mois, écrit : “ On citera surtout l’abbé Lorans, le directeur de l’Institut Universitaire St Pie X de Paris ”. Autant d’erreurs et d’absurdités.